La Maison des Cantons songe à plus de transparence

Pas de règles pour l’accès aux documents : les conférences des cantons agissent dans l’opacité. (Photo Keystone/Lukas Lehmann)

Par Martin Stoll. Formation, police, social : les conférences intercantonales prennent des décisions importantes, en général à l’écart des regards du public. Après que Loitransparence.ch eut critiqué ce manque de transparence, les cantons ont instauré un groupe de travail.

Parquets de chêne, piliers de marbre stuqué, robustes portes de bois rembourrées : l’élégante bâtisse de la Speichergasse à Berne diffuse des valeurs solides. Distant de 400 mètres du Palais fédéral, l’ancien siège du télégraphe et du bureau des brevets abrite désormais le quartier-général des cantons.

Depuis neuf ans et demi plus de 150 fonctionnaires y travaillent pour les diverses conférences intercantonales. Les cantons ont un avant-poste au cœur de l’appareil administratif et politique helvétique. Juristes, lobbyistes et secrétaires coordonnent les flux d’information, réunissent des groupes d’intérêts, gagnent en influence.

Les cantons ont installé à Berne un instrument de pouvoir. (Photo Keystone/Peter Klaunzer)

Au moins 25 aréopages cantonaux s’activent aujourd’hui dans la Maison des Cantons : de la Conférence des directeurs de l’instruction publique ou du social à celle des commandants de police en passant par la Conférence des responsables cantonaux des achats publics. C’est ici aussi que l’on voit naître des concordats intercantonaux contestés : l’accord sur l’harmonisation des l’école obligatoire Harmos, le Lehrplan 21 ou le concordat sur les hooligans, par exemple.

Mais les conférences et les concordats de plus en plus contraignants ne sont pas soumis à la transparence. Ils n’obéissent à aucune loi sur la transparence et se concoctent dans l’opacité. Ils ne créent de la transparence que si ça les arrange et fixent la pratique d’information de cas en cas.

Exemple de cette manie du secret : la « liste noire » des directeurs de la Conférence de l’instruction publique. La CDIP confirme de manière confidentielle l’existence de cette liste où apparaissent des enseignant-e-s pour des agressions sexuelles. La Conférence maintient le secret le plus strict sur le nombre des signalements. Raison : « Donner des chiffres concrets entraînerait très probablement des interprétations fausses, des « classements » irrecevables, des analyses de données peu fiables et, par conséquent, des inquiétudes. » On ne s’attend pas à ce que le public sache apprécier une statistique sur les interdictions d’exercer la profession d’enseignant.

Il faut des règles de transparence applicables

Une telle interprétation contrevient à l’esprit du principe de transparence auquel se soumettent désormais la Confédération et la plupart des cantons, qui confère aux journalistes et aux citoyens de vastes droits d’accès aux dossiers et aux données de l’administration.

Loitransparence.ch a attiré l’attention de la Conférence des gouvernements cantonaux sur le fait que journalistes et citoyens ne bénéficiaient pas de droits d’accès clairement formulés aux conférences des gouvernements et des directeurs de départements. Nous avons interpellé Benedikt Würth, président de la CdC, en lui demandant de prendre les mesures propres à assurer la transparence administrative dans le sens de la loi sur la transparence en vigueur :

  • L’adoption de directives claires qui garantissent l’accès aux documents des conférences cantonales et se réfèrent aux lois sur la transparence en vigueur.
  • La définition d’une instance de conciliation indépendante qui enquête en première instance et délivre une recommandation.
  • La définition d’une voie juridique grâce à laquelle les requérants peuvent faire valoir leurs droits.

 

De nouvelles règles ces prochains mois

Dans une première prise de position, la Conférence des gouvernements cantonaux écrit qu’elle juge important que « les instances administratives assurant des tâches publiques règlent clairement l’accès aux informations ».

D’accord avec les directeurs de conférences, la CdC a créé un groupe de travail. Ces prochains mois, des règles sur l’accès aux documents devraient être élaborées. « L’objectif est de définir les règles sur le traitement des informations concernant les conférences intercantonales de telle manière qu’il soit tenu compte du principe de transparence », est-il dit dans une prise de position.

On verra si les cantons sacrifient leur souveraineté sur l’information dans leur manie du secret intercantonal et se soumettent véritablement au principe de transparence.


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