Le Conseil fédéral veut taire le prix des médicaments

Seul le prix final d’un médicament doit être connu de la population: une pharmacie à Berne. (Photo: Gaetan Bally/Keystone)

Par Martin Stoll. Les accords sur les modèles de prix dans la loi sur l’assurance-maladie (LAMal) devraient être exclus de la loi sur la transparence, demande le Conseil fédéral. Une restriction qui mettrait à mal le principe de transparence.

 

 

 

Le Conseil fédéral peut exclure des unités de l’administration fédérale du champ d’application de la loi sur la transparence. Ce à quoi il a renoncé jusqu’à présent. Cependant, dans le cadre de la révision de la loi sur l’assurance-maladie, le gouvernement prévoit désormais d’affaiblir le principe de transparence.

 

Concrètement, la loi sur la transparence ne devrait plus s’appliquer aux accords sur des modèles de prix et d’éventuels remboursements. Le Conseil fédéral évoque des restrictions «inévitables» au détriment de la transparence. Il argumente que le marché n’est pas prêt à accepter la transparence dans ce domaine. Le prix effectif à payer pour un médicament doit être maintenu secret, d’après lui. C’est la seule façon pour la population de bénéficier d’un accès rapide aux nouvelles thérapies innovantes.    

La transparence des coûts de la santé est cruciale

Avec cette restriction de la transparence, le Conseil fédéral contredit la jurisprudence, basée sur des arrêts du Tribunal fédéral et du Tribunal administratif fédéral. Ces derniers ont clairement précisé que les entreprises qui concluent des affaires avec le secteur public doivent faire preuve d’une transparence accrue. Les prix des médicaments sont en grande partie financés par des fonds publics. La Cour européenne des droits de l’homme et l’Organisation mondiale de la santé s’engagent elles aussi résolument en faveur d’une transparence globale de l’administration.

Ce retour vers le principe du secret est particulièrement dérangeant face au large consensus social sur l’importance de la transparence des coûts de la santé. Si le principe de transparence est réduit au cas par cas et en fonction des intérêts, il deviendra dès lors la cible des lobbyistes et des représentants d’intérêts. L’objectif du principe de transparence, qui est de gagner la confiance des citoyennes et citoyens, serait gravement menacé. Sans parler du fait qu’un contrôle public joue un rôle important dans la fixation des prix des médicaments.

Les intérêts privés sont déjà suffisamment protégés

Il est déjà possible pour l’administration, au moyen d’une pesée des intérêts publics et privés, de stopper les demandes d’accès qui visent explicitement à sonder la concurrence. Les dispositions d’exception prévues dans la loi sur la transparence suffisent amplement à protéger les intérêts supérieurs à la transparence. Les règles actuelles en matière de transparence ont aussi pour mission de garantir un bon accès aux soins de la population.

Il est important que les citoyennes et citoyens puissent continuer de comprendre comment les prix des médicaments sont fixés. Le gouvernement doit impérativement s’engager en faveur du principe de transparence des activités étatiques. C’est précisément autour du prix des médicaments que la transparence est particulièrement nécessaire. L’État n’a pas à se rendre complice d’un jeu de poker opaque.


Ecrire un commentaire

Vous devez être inscrit, pour pouvoir écrire un commentaire.